Lawal Quilcas

"Notoirement, il n'existe aucune classification de l'univers qui ne soit pas arbitraire et conjecturale. La raison en est très simple : nous ne savons pas ce qu'est l’univers ».

Dans: In Other Inquisitions, 1937-1952 Jorge Luis Borges University of Texas press P.104.

Lawal

Lawal est le nom de l’arbre millénaire qui pousse notamment en Patagonie argentine, c’est un cyprès ( Fitzroya cupressoide) appelé Alerce en espagnol. En langue Mapuche, le mapudungun langue des habitants vivant dans cette région depuis certainement plus de mille ans il signifierai « celui dont la mémoire ne meurt pas » 

Quilcas

Quilcas est un nom utilisé pour décrire un art graphique rupestre entre l’écriture et l’ornement de la civilisation précolombienne présent chez les incas et toujours énigmatique quant à sa signification.

Lawal Quilcas

Lawal Quilcas vise à interroger notre rapport au temps et à la nature dont nous faisons partie au travers d’un élément essentiel à la vie de toutes les espèces dont la nôtre : L’arbre. Il s’agit ici de l’arbre millénaire de Patagonie, Lawal en Mapuche / Alerce en espagnol.

Celui-ci est considéré par les scientifiques comme une "horloge" absolue qui témoigne dans ses cernes, des conditions de la vie sur la terre et d'véènements majeurs du cosmos. Il a d’autre part été compris par des cultures ancestrales, les indiens mapuches, comme une entité détentrice de la mémoire... c’est précisément sur cette correspondance que le projet se fonde.

Le projet Lawal Quilcas a été initié suite à l’invitation d’un groupe interdisciplinaire de recherche baptisé CHASCA regroupant des scientifiques de laboratoires de dendrochronologie et paléoclimatologie -Valérie Daux- de climatologie et environnement-Christine Hattié-, de magnétisme terrestre - Catherine Kissel- et d’astrophysique -Thierry Stolarczyk- (déjà complice pour Aganta Kairos) implantés au CEA Paris Saclay.

En Mars 2022 Laurent Mulot rejoint une expédition scientifique de terrain dans la forêt du Lac Menendez en Patagonie argentine (42°42’ S // 71° 56’ O) Cette expédition est composée de chercheurs argentins du CONICET pilotée par Ricardo Villalba, glaciologue et dendrochronologue et d’une chercheuse française en paléoclimatologie, Valérie Daux. L’expédition a pour objet l’observation de la flore de la jungle froide de cette région et la récolte de prélèvements sur les arbres millénaires Lawal/Alerces. Ces prélèvements (non destructifs) sont les matériaux utilisés ensuite pour dater les cernes des arbres puis analyser leurs compositions pour interpréter les données révélant des informations sur le climat terrestre passé, le magnétisme mais aussi portant potentiellement la trace d’évènements cataclysmiques de l’univers. Lawal Quilcas se focalise notamment sur l’année 1054, année de la première observation sur terre de la nébuleuse du crabe par les astronomes chinois.

A la suite de cette expédition qui est l’occasion pour l’artiste de prises de sons, d’images fixes et en mouvement, Laurent Mulot part à la rencontre d’habitants de la région du Lac Menendez. Parmi ceux-ci se trouvent des indiens mapuches dont la culture est installée depuis plus de mille ans en Patagonie, mais également des descendants de colons européens notamment basques et suisses arrivés à la fin du 19ème siècle et au début du 20ème siècle, et de nouveaux arrivants installés dans cette région du Chubut pour y pratiquer l’horticulture dont la pépinière de Lawal et l’ébénisterie.

Les Mapuches (gens de la terre) ont une conception inclusive de leur milieu de vie dans le sens où le concept de nature n’est pas séparé de leurs propres essences / existences, ce qui implique une relation non dominatrice de leur environnement. L’arbre Lawal est considéré comme détenteur d’une mémoire partagée, une histoire de vie partagée avec tous ceux, humains, faune, flore, minéraux même célestes rencontrés durant sa vie millénaire. C’est ce dont témoignent et montrent dans leurs vie quotidiennes les Mapuches des communautés Emilio Prane à Nahuel Pan, Mariqueo à Esquel et Cheuquehuala au Lago Rosario.

Pour les descendants de colons européens l’histoire a été différente et la rencontre avec la forêt et le Lawal plutôt du côté d’une tentative d’exploitation de sylviculture qui se révèlera impossible au vu de la dimension des arbres et de la difficulté topographique. Aujourd’hui c’est parfois l’écotourisme qui allié à une activité d’agriculture vivrière fait vivre ces familles. Le 3 mars 2023, une assemblée humaine composée de représentants de communautés mapuches, de descendants des premiers colons basques et suisses, d’habitants impliqués dans le projet c’est réunie au bord du lac vert en Patagonie argentine dans le parc national des Alerces pour célébrer Lawal Quilcas chez les Coronado aux bons soins de Bianca, Raul, de leurs enfants et petits-enfants.

Laurent Mulotmofn chrono
Paul Ardennetexte critique